Des nouvelles à dévorer en numérique

Comme je l’ai dit dans un précédent billet, je me fais une cure de lecture numérique, plus précisément de textes publiés exclusivement en dématérialisé. Je me régale. Voici quelques retours de lectures récentes :

 

A bloody Melody de Maëlig Duval, aux éditions Néobook

Maëlig Duval est l’auteur d’une étonnante novella de SF sortie chez Griffe d’Encre intitulée l’Après-Dieu, que j’avais lue avec grand plaisir. Univers original et subtil, langue précise, personnages étranges, j’avais été séduite par cet ouvrage qu’on peut classer en post-apocalyptique, mais « apaisé » en ce sens que les évènements qui ont conduit au changement du monde sont lointains et « digérés » par les protagonistes.

La publication d’un nouveau texte ne pouvait qu’attirer mon attention. Voilà que cette nouvelle me conforte dans l’idée que Maëlig a une fibre particulière. Il s’agit d’une histoire de vampire. Voire ! Un vampire qui aime les claquettes, prend même des cours, devient fan de George Guétary, hante les réseaux sociaux, bosse comme traducteur dans son appartement semi-enterré avant de partir se nourrir à la nuit tombée ? Voilà qui n’est pas un personnage conventionnel. L’ancrage dans la réalité est réussi par des petits détails qui parsèment le texte. Subtilité, voici le nom qui me parait le mieux décrire le travail de cet auteur à suivre.

 

La clé de l’eau d’Agnès Evans, dans la collection Micro de Walrus ebooks

Un très joli texte de fantasy, dont je retiendrai surtout l’ambiance de caravanes, les références au nomadisme. Il s’agit plus précisément d’un récit d’initiation où une toute jeune fille découvre ses pouvoirs surnaturels malgré les réticences de sa mère. L’univers est bien décrit ainsi que l’angoisse des protagonistes face au phénomène de sécheresse. L’histoire elle-même est somme toute assez classique, mais forte en symboles. Je me demande si cet univers ne serait pas intéressant à développer sur un format plus long. (J’aurais bien fait un tour dans les villes et pays évoqués, tant cette nouvelle fait rêver…)

 

Les Saigneurs de Aude Cenga, dans la collection Micro de Walrus ebooks

On change complètement de ton ici. Texte cynique et percutant, l’auteur nous présente un monde sans autre morale que celle de l’audience télé. De la télé réalité avec des vampires ? Cela m’a rappelé un peu l’ambiance malsaine du théâtre des vampires chez Anne Rice, mais en plus léger, finalement. Car enfin, les humains qui se prêtent à ces émissions le font volontairement (comme les candidats d’aujourd’hui, d’ailleurs), à part les pauvres hères qui servent de casse-croûte aux nymphettes assoiffées en fond de scène. Une langue impeccable pour un propos implacable. Cœurs sensibles…

 

Au service des insectes, de Cindy van Wilder, chez Voy’el, collection E-courts

Dans un monde conquis par les insectes, les humains rentrent à leur service ou souffrent de misère. Bess est l’une de celles qui ont choisi de prendre soin des larves des insectes, leur prodiguant les soins nécessaires. Elle se sent pourtant, malgré sa condition de presqu'esclave, prise de tendresse pour ses protégées, ces petites vies qui réagissent à son toucher au fond de leur cocon. En faisant cela, elle est considérée par d’autres comme une traîtresse à son espèce…

Je trouve ce texte audacieux par sa philosophie. Doit-on s’arcbouter sur les fautes du passé, commises de part et d’autre lors d’une guerre, ou peut-on faire l’effort de construire une réconciliation ? L’auteur laisse la porte ouverte, le lecteur ne sait pas si cet épisode heureux sera la première pierre d’une paix et de la reconquête de la liberté pour les hommes, ou s’il ne s’agit que d’un épisode de clarté fugace dans un futur construit sur des cendres. En tous les cas, cette nouvelle est pleine de qualités littéraires et d’une chaleur humaine porteuse d’espoir.

Voilà, quatre textes chez trois éditeurs différents, autant de raisons de se pencher sur ces textes ciselés avec soin, comme des pièces d'orfèvrerie. J'aime les nouvelles, eh oui, et depuis toujours...