Titre : Chesstomb
Auteur : John Ethan Py
Editeur : L’Homme sans Nom
Nombre de pages : 391
Quatrième de couverture :
« Son corps meurtri et griffé avait pris une teinte bleuâtre se
confondant avec celle du sapin, si bien que ceux qui le trouvèrent crurent un
instant à une statue végétale surgie de l’arbre lui-même. »
1922. Howard Phillips Lovecraft écrit une de ses plus étranges nouvelles : Herbert West, réanimateur.
2001.
Le meurtre atroce d’une famille plonge la ville de Chesstomb dans le deuil. Journaliste de renom, Shelby Williams vient y enquêter. Accumulant une somme de documents qui fera date dans l’histoire du journalisme d’investigation, il remonte peu à peu l’histoire de la ville. Jusqu’à cette fameuse année 1922 qui a vu la querelle de plusieurs médecins tourner au tragique. Le plus étrange : tout indique que le personnage de Lovecraft aurait son origine dans ce drame.
John Ethan Py accomplit la performance de mise en forme de ces documents presque oubliés, créant une œuvre vertigineuse, où le réel et l’imaginaire s’entremêlent avec une force insoupçonnée.
1922. Howard Phillips Lovecraft écrit une de ses plus étranges nouvelles : Herbert West, réanimateur.
2001.
Le meurtre atroce d’une famille plonge la ville de Chesstomb dans le deuil. Journaliste de renom, Shelby Williams vient y enquêter. Accumulant une somme de documents qui fera date dans l’histoire du journalisme d’investigation, il remonte peu à peu l’histoire de la ville. Jusqu’à cette fameuse année 1922 qui a vu la querelle de plusieurs médecins tourner au tragique. Le plus étrange : tout indique que le personnage de Lovecraft aurait son origine dans ce drame.
John Ethan Py accomplit la performance de mise en forme de ces documents presque oubliés, créant une œuvre vertigineuse, où le réel et l’imaginaire s’entremêlent avec une force insoupçonnée.
A lire absolument si on aime :
Les romans horrifiques
Howard Phillips Lovecraft et son époque
Une intrigue fantastique bien construite et les clins d’œil
au passé (à Descartes, en particulier)
Un jeu entre fiction et réalité
A éviter si on cherche :
Attention : âmes sensibles, s’abstenir. Les scènes
d’horreur sont pas mal costaudes.
L’avis du critique :
La dernière sortie des éditions de l’Homme sans Nom mérite
grandement qu’on s’y intéresse si on n’est pas rebuté par l’épouvante et
l’horreur. Les âmes sensibles auraient du mal avec cet ouvrage, et d’ailleurs
la couverture annonce la couleur : Sombre comme l’intrigue, jaune/vert
comme le sérum maléfique.
L’intérêt de ce texte réside dans le fait qu’on peut à mon
sens le lire à plusieurs niveaux, ce qui est la marque des bons romans.
Déjà, sa forme n’est pas ordinaire : il est présenté
comme le résultat d’une investigation menée par un journaliste, Shelby
Williams, à partir d’un premier texte publié de façon confidentielle, doublés
d’un impressionnant travail de recueil d’informations et de notes auprès des
protagonistes des faits. Il effectue un parallèle entre plusieurs évènements
horrifiques survenus à diverses époques dans la petite ville de Chesstomb, non
loin de Providence en Nouvelle Angleterre. Le début de l’histoire est dépeint
par petites touches, comme une compilation d’articles, d’extraits de journaux
personnels, de notes de travail, formant peu à peu un paysage d’où l’horreur
émerge. Cette partie dont la narration peut paraître distanciée reste immersive
grâce aux passages décrivant les dernières minutes de vie de la malheureuse famille
Sheldon et les lettres amoureusement écrites par Williams à son épouse. Je dois
dire que j’ai tremblé pour lui jusqu’au bout : son désir de savoir la
vérité, de recueillir des preuves et de terminer ce travail m’avait fait
craindre le pire. Quoique… mais non, je resterai muette !
Egalement, et je me suis régalée, une grande partie du roman
est consacrée à la genèse de la nouvelle de HP Lovecraft, Herbert West,
réanimateur. Nous avons donc le plaisir de rencontrer Lovecraft, de le côtoyer,
d’en apprendre plus sur sa santé fragile et son travail d’écrivain. On entend
parler de Abdul Alhazred (Aah ! le Necronomicon), nous voyons lord Dunsany
dédicacer de façon étrange. L’ambiance de fin de cycle, un peu décadente, de
cette époque des années 20 se personnalise, je trouve, dans la relation toxique
entre Wade, ami de Lovecraft, personnage miroir de l’affaire Charles Dexter
Ward, et l’inquiétante Mara Lurcia. Et la partie horrifique ne laissera pas les
amateurs en route.
L’auteur évoque de plus René Descartes et ses supposées
relations avec le cercle ésotérique des Rose-Croix (et là, c’est l’ancienne MJ
au jeu de rôle Nephilim qui se régale). Le thème de l’automate fantastique
joueur d’échecs me parait particulièrement bien exploité et amène quelques
scènes bien inquiétantes. Du reste, le thème du jeu d’échec est largement
évoqué dans le roman et les personnages prennent tous une place sur l’échiquier
de l’histoire, d’une façon habilement diluée. (que je n’avais pas perçue,
pressée que j’étais de savoir la suite…)
Je trouve enfin très intéressante la façon dont ce roman est
présenté au public que nous sommes. L’auteur, John Ethan Py, cache son identité
derrière un masque. Le livre est présenté comme un recueil de faits réels et
non comme une œuvre de fiction et le site internet du livre (http://chesstomb.weebly.com/)contribue
lui aussi à brouiller les cartes entre fiction et réalité, avec un petit coup
de théorie du complot pour faire bon poids. Je trouve cet exercice audacieux et
passionnant à plus d’un titre en particulier par cette mise en évidence de ce
que nous vivons aujourd’hui : pouvons-nous croire les médias ?
Aujourd’hui il n’a jamais été plus facile de falsifier un document, une photo. Où
se situe donc la réalité ? Et si dans la fiction que je lis une certaine
dose de réalité venait à me faire douter du caractère fictionnel de ma
lecture ? Nous voici donc dans la situation inverse de celle que nous
expérimentons par exemple dans les émissions de télé-réalité. Elle n’est pas
moins anxiogène, n’est-ce pas ?
La fin a failli me décevoir mais si vous lisez le roman, ne
vous arrêtez pas au premier dénouement qui peut paraître très « deus ex
machina », et terminez le livre (d’ailleurs, de mémoire, il vous restera
trente pages, ce serait dommage de vous priver de la fin !), il contient
une dernière surprise très bien amenée (qui m’a d’ailleurs donné envie de relire
le bouquin pour redécouvrir l’histoire à la lumière de cette révélation) qui
conclut superbement ce texte en laissant quelques zones d’ombre, typiques de
Lovecraft et de son « indicible ».
Je ne peux pas terminer cette chronique sans citer les innombrables
références contenue dans le roman. Pour un amateur de fantastique avec un brin
de culture classique, il comporte une série d’hommages à de grandes
œuvres : la forme épistolaire qui rappelle Dracula de Bram Stoker, le
style soutenu des passages situés dans les années 20 avec Howard Phillip
Lovecraft en protagoniste « guest star », qui vient en contrepoint à
une ambiance très contemporaine à la Masterton, la reine blanche recousue dans
son linceul est à mon sens un clin d’œil
à la fiancée de Frankenstein (le film de 1935 avec Boris Karloff) ;
ajoutez à cela la situation géographique en Nouvelle Angleterre, et les grands
thèmes classiques que sont la maison bourgeoise isolée cachant un secret
épouvantable, le savant obnubilé par ses recherches et perdant tout sens moral,
la quête d’immortalité, la folie et les troubles de personnalité et, en forme
de dernier clin d’œil à la mode actuelle, des morts réanimés proprement (si
j’ose dire) terrifiants, tout ceci contribue à un texte passionnant, que l’on
dévorera dans un premier temps, pour le reprendre ensuite, au calme, afin d’en
déguster toute la substantifique moëlle…
Si vous aimez ce roman, je ne saurais trop vous recommander de lire, chez le même éditeur, le Songe d'Adam, de Sébastien Péguin. J'en ai parlé sur ce même blog, et c'est aussi un roman horrifique qu'on ne lâche pas avant la fin.
Si vous aimez ce roman, je ne saurais trop vous recommander de lire, chez le même éditeur, le Songe d'Adam, de Sébastien Péguin. J'en ai parlé sur ce même blog, et c'est aussi un roman horrifique qu'on ne lâche pas avant la fin.
Le petit plus du livre : la couverture d’Alexandre
Dainche, dédicacée à ceux qui détestent les seringues !
Article passionnant dans lequel je découvre que tu étais MJ à Nephilim ! J’ai dévoré ce JDR, mais je n’ai jamais eu les joueurs, et surtout le temps, pour le tester ;) Mais on se fera peut-être un jour une partie, qui sait ;)
RépondreSupprimerSinon, le bouquin a l’air génial, en plus je suis fan de HPL… Je le mets dans ma wishlist, merci pour l’info ! ;)
Aaah Nephilim... Génial, ce jeu. J'avais une super équipe bien déjantée, nous nous sommes vraiment beaucoup amusés avec ce jeu (toute la campagne du Dragon en Bretagne est un de nos bons vieux souvenirs !).
RépondreSupprimerMerci de ta visite ! J'espère que Chesstomb te plaira !